CABINET STRIDE AVOCAT, Victoria HOLKA, mis à jour le 27 juillet 2021
Le 21 juillet 2021 marque l’élargissement du passeport vaccinal qui suscite de nombreuses interrogations et notamment quant à l’attitude à adopter face à ses salariés, dans le respect de l’obligation de santé et sécurité qui incombe à l’employeur.
Les mesures annoncées par le Gouvernent le 12 juillet 2021, et adoptées par le Sénat le 25 juillet, soulèvent deux interrogations, à savoir :
- L’étendue et le régime de l’obligation vaccinale des professions en contact avec les plus fragiles ;
- Les conséquences de l’élargissement du pass sanitaire à une certaine partie des établissements recevant du public.
LA VACCINATION DES PROFESSIONNELS EN CONTACT AVEC LES PLUS FRAGILES :
Le Président de la République annonçait le 12 juillet dernier, l’obligation pour les professionnels, au contact des personnes fragiles, d’être vaccinés pour pouvoir continuer d’exercer leur activité, à compter du 15 septembre 2021.
Toutefois, se pose la question de l’étendue d’une telle obligation : quelles professions sont concernées, le cas échéant quelles sont les conséquences pour un salarié qui refuserait de se faire vacciner, quels sont les risques portés par l’employeur.
Ainsi, le projet de loi, adopté par le Sénat le 25 juillet 2021, fait état, au sein de son article 5, de la liste des professions soumises à l’obligation vaccinale, et notamment[1] :
- Le personnel soignant ;
- Les centres et maisons de santé ;
- Les services de santé au travail et les services de santé au travail interentreprise ;
- Les établissements et services médico-sociaux ;
- Les résidences‑services dédiées à l’accueil des personnes âgées ou handicapées ;
- Les ostéopathes ou chiropracteur ;
- Les personnes exerçant l’activité de transport sanitaire ;
- Les professionnels employés par un particulier employeur âgé ou handicapé, à des fins personnelles.
La liste exhaustive présentée par le Gouvernement soulève, à ce titre, la question du régime d’application. C’est en ce sens que les articles 7 et 8 du projet de loi susvisé, dressent la liste des conséquences pour une personne qui refuserait de se faire vacciner alors même que sa profession l’y oblige, et des risques portés par l’employeur.
Ainsi, l’article 7 précise que, à compter du lendemain de la promulgation de la Loi ( en cours) , les personnes visées par la présente loi ne peuvent plus exercer leur activité si elles ne présentent pas un des documents composants le pass sanitaire (certification de rémission, certificat vaccinale ou test négatif de moins de 48 heures).
Le projet de loi précise ensuite que la non présentation du passeport vaccinale impliquera une interdiction d’exercer à compter du 15 septembre 2021.
Une exception étant prévue pour les personnes justifiant de l’administration d’au moins une dose, en cas de schéma vaccinal comprenant plusieurs doses, et ce jusqu’au 15 octobre 2021. Ledit justificatif devant s’accompagner d’un dépistage négatif à la Covid-19.
Dès lors, lorsque l’employeur constate l’interdiction d’exercer de l’un de ses salariés, il devra notifier à ce dernier, sans délai, les conséquences qu’emporte l’interdiction d’exercer sur son emploi, et les possibilités de régularisation.
Le projet de loi ouvre droit au salarié de faire usage de ses jours de repos conventionnels et congés payés, avec l’accord de l’employeur afin de régulariser sa situation. A défaut, le contrat de travail sera suspendu.
La suspension s’accompagne de l’interruption du versement de la rémunération. Cette période ne pouvant être assimilée à une période de travail effectif pour la détermination de l’ancienneté ou des congés payés. Toutefois, le salarié conserve le bénéfice des garanties de protection sociale complémentaire auxquelles il a souscrit.
L’employeur constatant qu’un professionnel de santé ne peut plus exercer son activité depuis plus de trente jours, informe, le cas échéant, le conseil national de l’ordre dont il relève.
Bien plus, dans les entreprises de plus de 50 salariés, l’employeur informe, par tout moyen et sans délai, le CSE des mesures de contrôles mises en place aux fins de respect des dispositions précitées. L’avis du CSE devant intervenir, au plus tard un mois, à compter de la communication faite par l’employeur.[2]
Cependant, le motif de licenciement propre, envisagé par le Gouvernement dans son projet de loi, n’a pas été repris par le Sénat.
Tout manquement de l’employeur à son obligation de contrôle l’expose à un risque de condamnation pénale, pouvant aller jusqu’à 1.500 euros d’amende, porté à 9.000 euros en cas de récidive (trois en trente jours).[3]
Cependant, une précision reste à faire quant à la prise de rendez-vous aux fins de vaccination. L’article 9 dudit projet de loi précise que les salariés bénéficient d’une autorisation d’absence pour se rendre aux rendez-vous vaccinaux. Une autorisation d’absence pouvant également être accordée au salarié accompagnant leur enfant mineur aux rendez-vous liés à la vaccination.
Ces absences ne pouvant nullement être imputées sur la rémunération puisqu’étant assimilées à une période de travail effectif pour le calcul de la durée des congés payés et l’ancienneté.
ELARGISSEMENT DU PASS SANITAIRE AUX ETABLISSEMENTS RECEVANT DU PUBLIC
L’article 1er du Projet de loi N°4386 relatif à la gestion de la crise sanitaire, tel que repris par le Sénat, est formel, l’élargissement du pass sanitaire aux ERP (Etablissements Recevant du Publics) s’applique, non seulement au public reçu, mais également aux salariés exploitant les sites.
Dès lors, l’ensemble des dispositions relatives à l’obligation vaccinale précitée (suspension du contrat de travail, usage des jours de congés, interruption du versement de la rémunération) seront applicables aux salariés d’un ERP, à compter du 30 août 2021, ne présentant pas un examen de dépistage négatif, un justificatif de statut vaccinal ou un certificat de rétablissement à la suite d’une contamination à la covid-19.
Le projet de loi impose à l’employeur de notifier le jour même de la constatation de l’irrégularité, et par tout moyen, la suspension du contrat de travail à son salarié.
Si l’irrégularité se maintient pendant une durée supérieure à trois jours, l’employeur convoque le salarié à un entretien afin d’envisager les moyens de régulariser sa situation ou, le cas échant, les possibilités d’affectations temporaires sur un autre poste non soumis au pass sanitaire.
Etant précisé que le contrat de travail à durée déterminée (CDD) peut être rompu avant l’échéance du terme, à l’initiative de l’employeur, sur le fondement du licenciement pour motif personnel. [4]
Les dommages et intérêts, légalement prévus, et compensant la rupture anticipée, ne sont pas dus au salarié. Le salarié perçoit tout de même l’indemnité de fin de contrat.
Le projet de loi dresse une liste exhaustive des établissements visés, et notamment :
- Les activités de loisirs ;
- Les activités de restauration commerciale ou débit de boisson à l’exception de la restauration collective, vente à emporter, et restauration professionnelle routière et ferroviaire ;
- Les foires, séminaires et salons professionnels ;
- Sauf urgence, les services et établissements sociaux pour les personnes accompagnantes ;
- Les activités de transport public de longue distance.
Tout manquement de l’employeur a son obligation de contrôle l’exposant à une amende pénale de 1.500 euros, portée à 9.000 euros d’amende et un an d’emprisonnement en cas de récidive (trois en trente jours).
Les dispositions relatives à la consultation du CSE et à l’autorisation d’absence accordée aux salariés pour la vaccination s’appliquant également pour les ERP.
Enfin, il convient de souligner que le présent projet est soumis à un contrôle de constitutionnalité par le Conseil constitutionnel.
Ce qui qui pourrait une nouvelles fois faire bouger les lignes…
[1] Projet de loi n°801 relatif à la gestion de la crise sanitaire – Sénat
http://www.senat.fr/leg/pjl20-801.html
[2] Article 7bis du projet de loi n°801 relatif à la gestion de la crise sanitaire – Sénat
http://www.senat.fr/leg/pjl20-801.html
[3] Article L.131-13 du Code Pénal – LEGIFRANCE
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006417259
[4] Article L.1232-1 du Code du travail – LEGIIFRANCE
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000019071126/